Le facteur sonne toujours deux fois
Belle histoire...
Un de mes livres favoris. Et je ne pense pas que "Le facteur sonne toujours deux fois", de James Mac Cain, soit vieillot ou dépassé mais c'est vrai qu'il peut agacer par son coté tragique et du fait de l'intrigue désespérement sombre. Car au fond Nick, ce bon vieux grec, apparaît comme le seul personnage un peu valable de l'histoire (d'ailleurs il est le seul qui donne un travail de pompiste à Frank Chambers), mais cependant ça ne signifie pas que ce roman représente intrinsèquement le genre du hard-boiled . En fait ça n'en est pas vraiment, et le style dramatique et réaliste omet toute nuance baroque ou volontairement "larger-than-life" qu'on retrouve souvent là-dedans !
Il s'agit en fait d'une oeuvre à la grâce flagrante tout comme la frêle Cora, ainsi qu'à la profonde humanité, que beaucoup devraient lire. L'americana et le rêve américain, tous deux narrés jusque dans les jeux d'argent et de hasard, les cartes, le poker, la roulette,le brelan, le billard; mais aussi chez ces héros du quotidien qui parviennent à que la réalité soit plus extraordinaire, en n'écoutant au final que leurs souhaits et voeux les plus intimes. Et puis il faut bien dire que l'automobile que Frank achète et qu'il partage avec sa jolie partenaire est, une fois de plus, représentative et symbolique de la réussite sociale qui amène une bonne vie en dépit de tout: les nombreux exemples dans la littérature et le cinéma seront très loin de manquer par la suite. Le point est certain que l'automobile devient non seulement un sujet et outil dans le récit, mais parallèlement, un vrai personnage. Enfin les personnages ont soif de réel, on ne peut nier qu'ils voient et constatent parfaitement bien que le milieu plutôt artificiel qu'ils fréquentent parfois manque de consistance, sinon d'agréabilité et de variété. Or, surtout de nos jours; qu'est-ce qui est plus important et déterminant en définitive et après tout, après l'argent bien sûr, que la culture ?
"Le facteur sonne toujours deux fois" est une très belle histoire, et si personnellement je préfère la seconde adaptation filmique avec sa scène de baiser légendaire - l'un des plus sincères du cinéma - (de Bob Rafelson avec J.Nicholson et J. Lange; 1980 ) plus proche du livre et de son aspect sulfureux à mon sentiment; au contraire, la version première de 1946 avec Lana Turner et John Garfield, est une sorte d' archétype du film noir. Tout cela n'amène que trop bien, en somme, la certitude que les saints ne sont que trop rares dans nos vies, et que pour finir, rien ni personne n'aidera ces deux individus dans leur fuite et déroute, vers l'absolu ou l'ailleurs; qu'on souhaite de toute façon tous un jour, malgré nos dires ou ces mauvais esprits acharnés.
[Auteur: DK1.]